Des filles et des femmes, toutes aussi belles les unes que les autres, étaient rassemblées là, parées de leurs magnifiques habits. Tout un jardin de fleurs réunies sur ce parterre où un spectacle féerique reçut Afid le photographe amateur. Une musique enivrante accompagnait une danse envoûtante. En effet, çà et là, des grappes de demoiselles aussi douces que jolies progressaient à un rythme affolant. De jeunes dames aux corps expressifs et suggestifs enflammaient la belle assemblée où la splendeur féminine resplendissait.La danse dite orientale était au rendez-vous juste sous le nez d'Afid. Celui-ci, yeux écarquillés, ne savait plus où donner de la tête tellement c'était délicieux, tellement c'était enchanteur. Obnubilé par ce monde merveilleux haut en couleur, Afid s'oubliait en surfant sur l'ouate de son âme se mouvant en apesanteur. Il survolait à bord du rêve, le jardin de la vie où tout n'était que plaisir et volupté. Subjugué par tant de charme, monsieur ne se rendit pas compte que l'on venait de couper la musique, car la mélodie continuait dans son esprit ensorcelé. Son regard fureteur avait accroché dès le départ une magnifique silhouette évoluant avec une extrême douceur. La robe bleue moulant admirablement son corps lui allait à ravir. Elle progressait légère comme si son être glissait sur un coussin d'air. Afid, envoûté et surtout hypnotisé, ne pouvait se détacher du déhanchement impitoyable, imprimé par un pas de danse extraordinaire. Tel un félin en chasse, il se tapit dans le creux du silence que seul son esprit percevait pour immortaliser l'instant qui le crucifiait. Épinglé par le temps sur la page éphémère de la vie pareil à un papillon magnétisé par la lumière, il se mit à fantasmer en imaginant la chevelure presque blonde en un précieux champ de blé. Une chute de reins renvoyant à une formidable ensellure de jument, crinière au vent, lâchée dans la vallée. Ah ! Mon Dieu, quel regard ! Oui, ses yeux meurtriers le clouèrent sur place quand pivotant sur elle-même pour aller s'asseoir, elle accrocha le sien. Afid se figea parcouru par un courant bizarre et tout à fait paralysant. Il eut l'impression que le temps s'était définitivement arrêté. En effet, quelque chose d'unique et de spécial venait de s'agripper à sa machine interne. Il ne comprenait plus rien à ce qui s'opérait en lui, mais notait un profond bouleversement, un quelque chose d'étrange et de beau. Tout son être était pris dans un tourbillon violent et doux. Il était là perdu et hésitant comme si quelque esprit, s'étant rendu maître de ses facultés, se jouait complètement de sa personne. Son cœur, où les émotions se livraient bataille pour se frayer un passage, était sous l'emprise d'un merveilleux breuvage. Sa raison battue à plate couture se livrait poings et pieds liés à cette nouvelle conjoncture. Afid n'était plus le même, il était devenu une chose très humaine.Cependant, malgré le ravissement de son âme, il conservait toujours une certaine clairvoyance d'esprit. Son regard ayant immortalisé cette grâce bleue en mémoire, il se mit en devoir de la chercher parmi le bouquet ayant enveloppé sa sœur resplendissante au milieu d'une multitude de fées. Enfin, il la débusqua tout près d'Imène ; elle était en train de papoter en riant de toutes ses dents. Le rubis des lèvres et l'ivoire des dents se disputaient sa bouche en la faisant ressembler à une grenade éclatée. C'était magnifique et beau ! Un flot puissant d'adrénaline le submergea en prenant d'assaut sa forteresse qui se rendit sans aucun compromis. Afid était sous le charme conquérant d'un amour naissant, fou et brûlant. Son cerveau abdiquant à la raison du cœur se mit lui aussi de la partie ; il s'appliqua à la sublimer en la lui présentant sur un plateau d'argent. Afid n'en revenait pas ! Il rêvait debout, il divaguait. Il se pinça la cuisse pour vérifier ; la douleur lui montra qu'il était conscient et éveillé.