<b>Emmelie Prophète fait partie des générations de femmes auteures haïtiennes contemporaines comme Yanick Lahens, Kettly Mars, Evelyne Trouillot, Edwidge Danticat.</b>Des personnages figés dans les filets du temps port-au-princien, marqué par la violence, la précarité et l'incertitude. Ce récit testamentaire livre une réflexion sur le temps, l'amitié et la mort.Avril 2000, le tonitruant journaliste Jean Dominique est assassiné. Dix ans plus tard, l'enquête piétine. Une jeune femme évoque ce matin d'horreur et de sang. Elle reconstitue l'image de cet homme engagé. Entre elle et lui s'est scellé un pacte, celui de la beauté et de la complicité, exalté par Hugo, Proust, Callas... C'est dans une ville assiégé par la faim, la haine et l'exclusion que Jean Dominique a trouvé la mort ainsi que Jean-Claude, le gardien de la radio. Le roman Le reste du temps raconte également l'histoire de Jean-Baptiste, ce vieux librairie qui, bien que sachant à peine lire, tient avec élégance sa boutique de livres.Avec attention et retenue, Emmelie Prophète peint une ville dans la tourmente où l’amitié, la fraternité et le partage aident à vivre – où la quête d’un exemplaire dépareillé de Sodome et Gomorrhe n’est jamais vaine.Extrait« Nous faisions silence devant les paliers inégaux de l’amitié. Nous n’étions pas suffisamment proches pour nous tenir la main comme le feraient des amis d’enfance ou des amis qui s’aiment tout court. Ce qui nous unissait c’est ce que nous avions en commun. Ces livres lus chacun de son côté. Cette envie secrète de partager nos rêves avec les autres jusqu’à l’impudeur. Je lui permettais d’être quel-qu’un d’autre que lui-même. Il était reconnaissant. Je n’étais pas intéressée à savoir quelles étaient ses relations avec le président, ce qu’il pensait réellement des associations paysannes, des usines. Je l’acceptais avec ses rumeurs et sa mauvaise foi, qui faisaient d’ailleurs partie de sa légende. Nous discutions. Sans nous entendre parfois. Nous nous écoutions avec jubilation. Moi, la fille anonyme, lui le chevalier sans peur et sans reproche sauf ceux qu’on lui adresse aujourd’hui encore, mais que je n’écoute pas, bien ancrée dans cette réalité que nous avions fabriquée rien que pour nous et ces héros de fiction auxquels nous prêtions nos voix. »L’auteureNée à Port-au-Prince, Emmelie Prophète est poète et romancière. Elle a étudié en littérature, en communication et en droit. Son oeuvre est publiée aux éditions Mémoire d’encrier: <i>Le testament des solitudes</i>, qui lui a valu le Grand Prix littéraire de l’Association des écrivains de langue française (ADELF) 2009, <i>Le reste du temps</i> (2010), <i> Impasse Dignité</i> (2012), <i>Le bout du monde est une fenêtre</i> (2015), <i>Un ailleurs à soi</i> (2018) et <i>Des marges à remplir et autres poèmes</i>(2018).Elle vit à Port-au-Prince.