Enfin, c'est fini ! se dit Nadia en sentant le corps de son mari se décontracter. Ouf, il était temps, car elle n'en pouvait plus. En son for intérieur, alors qu'il s'activait, elle ne cessait d'implorer Dieu d'écourter sa souffrance. Depuis un certain temps, elle appréhendait ce moment de devoir conjugal qu'elle n'aimait plus, qu'elle ne supportait plus. Il aurait dû être d'amour, de tendresse et de bonheur, voire de félicité. Malheureusement, il n'était plus qu'une corvée oppressante et suffocante, un véritable calvaire. Cependant, obéissante et non consentante, elle laissait faire sans rien laisser transparaître. Son éducation et sa culture ne lui permettaient pas le contraire. Elle accomplissait seulement son devoir en acceptant un instant animal aussi sale qu'un péché cardinal.Samir se roula sur le côté avec un soupir de satisfaction. Il était loin de se douter de la vérité, la réalité lui ayant obstrué les yeux de son cœur aveugle et fermé. Arrogant et prétentieux, il ne pouvait dépasser le cercle vicieux de la prétention absurde où il continuait à se maintenir malgré tous les feux rouges clignotants, depuis bien longtemps. Quand l'envie le prenait, il enfourchait le désir pour un petit galop de faible monture. Pleine de mépris, elle se retourna sur le ventre pour soustraire son visage défiguré par le dégoût du regard infâme de son crapuleux violeur légal. Emportée par son esprit rebelle loin du lit conjugal, elle demeurait affalée ainsi sans bouger comme engourdie et assoupie. Quelque temps plus tard, l'oreille aux aguets, elle esquissa un léger mouvement pour observer du coin de l'œil son malheureux conjoint. Celui-ci, complètement affalé à ses côtés, bouche ouverte et yeux fermés, en mâle satisfait, s'abandonnait dans les bras doux et concupiscents de Morphée. Nadia comprit qu'il était temps de se lever, car c'était l'instant qu'elle attendait pour aller vite se défaire de la souillure. Elle glissa doucement du lit sans faire de bruit et ce faisant, rejoignit la salle de bain sur la pointe des pieds. Vite, vite, la douche ! L'eau était tellement fraiche qu'elle en frissonna sous le premier jet. Cela lui fit du bien, dès lors que les picotements sur sa peau lui procuraient une formidable sensation de bien-être. Obsédée par ses idées, elle se passa la poire sur tout le corps sans omettre le moindre endroit. Plis et replis, coins et recoins, tout fit les frais d'une eau froide et décidée. La savonnette ne faisant qu'à sa tête glissait aussi rapide que l'eau sur les grains de la peau dans un geste rageur, et surtout purificateur. Là où elle sentait encore ses sales mains, là où il avait risqué ses lèvres infectes et osées, elle frottait pour enlever toute trace de cette audace qu'elle jugeait infernale et déplacée ; elle se rinça même la bouche qu'il n'a pas touchée, car il savait d'avance qu'elle la lui aurait refusée. Ceci dit, il ne la recherchait plus, se contentant d'aller droit au but sans passer par les préliminaires qui remplissaient jadis leurs nuits.Cela ne faisait que trois années depuis que les choses avaient changé entre elle et lui et cela lui paraissait une éternité. Le temps était devenu un ennemi pernicieux, lui volant ses instants heureux. Il ne passait plus comme avant, il prenait son temps à la faire souffrir au feu lâche et ravageur de l'ennui dévastateur. Faire l'amour était devenu non seulement insignifiant, mais aussi un véritable calvaire, une exécrable corvée, à laquelle elle devait souscrire, qu'elle était obligée de faire. Elle ne l'accomplissait pas, car son âme se refusait à une telle sollicitation. Elle subissait dans un silence meurtrier en comptant les secondes qui s'éternisaient comme si elles s'étaient liguées pour lui faire endurer son infortune et sa mortelle souffrance. Heureusement, il y avait la douche ! L'eau purificatrice était là, juste à côté, pour lui ôter toutes les salissures que son corps vil et méchant laissait sur le sien.