Je suis gynécologue-obstétricienne. Je viens de fêter mes quarante ans. Les vacances d’été touchent à leur fin. Un soir où je palpe machinalement mon sein gauche, je sens comme un petit grain de riz sous mes doigts. Insignifiant. Un kyste, certainement. Par acquit de conscience, je passe une échographie. Puis une biopsie, le 11 septembre. Le verdict tombe aussitôt, c’est un cancer ! Un cancer infiltrant. Alors, tout s’enchaîne : examens complémentaires, qui mettent au jour un deuxième foyer cancéreux ; exérèse des tumeurs et des ganglions ; ablation du sein ; chimiothérapie ; radiothérapie ; hormonothérapie ; reconstruction mammaire. Très vite, je retire ma blouse blanche. Découvrant l’envers du décor, je pose un regard de soignée sur le monde soignant que je croyais connaître. Je supporte la lourdeur des traitements. Courageusement ? non, je descends au fond du puits. Je suis morte. Le cancer relève de la bombe atomique. Quiconque ne l’a pas vécu dans sa chair ne peut jauger la violence de la déflagration qui se produit chez le sujet malade. Puis, un jour, la vie reprend… Lentement.