On reprochait à Mademoiselle Voss ses trop rares apparitions en France, et son silence même. C’est qu’elle chantait ailleurs, à Berlin ou Nairobi, sous le ciel de Damas et dans les jardins du Caire, ses chansons et celles des poètes de la chanson française, que son public fredonnait avec elle. Dans son ouvrage À l’ombre perdue de la grande guerre, recueil de sept carnets, rédigés à Paris, de 2007 à 2014, elle poursuit sa quête indiscrète des héritages oubliés, les nôtres, qu’elle dévoile à sa manière, facétieuse souvent, érudite toujours. Ainsi revient-elle sur les origines de l’Occident chrétien, peuplé des dangereux barbares, qui, baptisés, ne seraient plus jamais barbares, ni dangereux, d’ailleurs. Disparus, ces barbares ? Décadent, cet Empire ? Que de la défaite française de Sedan, en 1870, aient surgies les deux guerres mondiales, dévastatrices pour cet Occident chrétien, pose de terribles questions : mais qui les a voulues, ces guerres, pouvait-on les éviter, qui les a encouragées ? Enfin, les conditions difficiles de la christianisation de l’Empire romain, en Afrique et au Levant, aux iiie et ive siècles de notre ère, n’ont-elles pas été sources de conflits, dont Mahomet reconnaissait avoir saisi les fruits ? N’en voit-on pas ressurgir les feux, aujourd’hui en France, l’ancienne métropole d’un Empire méditerranéen disparu ? Disparu quand, au fait, pourquoi, et au profit de qui ?