À Milan Kundera, et en guise de mot de retard, Cette nuit, Milan, je me suis replongé dans ton livre, L’Art du roman, pour y puiser quelques idées sur la structure à apporter à ce présent texte, à travers lequel je me présente aux Français comme candidat à l’élection présidentielle. On réfléchit mieux en bonne compagnie. Dans ton Discours de Jérusalem, daté de 1985, et intitulé « Le Roman et l’Europe », tu cites ce proverbe juif que je ne connaissais pas : « L’Homme pense, Dieu rit. » Et quelques lignes plus loin, toi, l’écrivain tchèque qui écrit en français, tu regrettes qu’on ait oublié le mot « agélaste » créé par Rabelais, repris du grec et qui signifie « celui qui ne rit pas, qui n’a pas le sens de l’humour ». Sois rassuré, je l’ai rajouté dans mon dictionnaire personnel des insultes du capitaine Haddock, aux côtés de « doxosophe », « vouvouzela », « frère d’autruche », « chrysophile » et autres « Vishnuïste », « glébeux » et « pense-phrase ».Mais, Milanku, les mots ne suffisent plus pour exprimer la colère de ce pays. Les politiques, ils ne nous font plus rire. Ils ne savent plus penser. Plus personne ne sait quoi penser. Et voilà que je déboule à la dernière minute, comme en courant sur le quai de la gare : « Attendez ! Attendez ! J’ai des idées ! » Et une fois dans le train, de m’excuser auprès du contrôleur en lui tendant ce livre : « Je suis en retard, j’ai réfléchi trop longtemps. »« Dépêchez-vous, je crois qu’il me répondrait. Il ne vous reste plus que quelques semaines pour convaincre 500 maires et 44millions d’électeurs ! »« L’homme pense, Dieu rit. » Mais il ne se moque pas. Et tant pis pour qui rirait.