Depuis 2006, le Québec débat âprement des règles gouvernant la laïcité de ses institutions et se trouve confronté à deux modèles apparemment irréconciliables : le républicanisme « jacobin » et le libéralisme individualiste, issus respectivement de la France et du Canada.En s’inspirant de la pensée du philosophe politique John Rawls, les auteurs proposent ici d’explorer une voie médiane mieux adaptée à l’expérience québécoise. Dans ses travaux tardifs, Rawls met en avant une forme de libéralisme républicain affranchi de l’individualisme normatif de Kant et de Mill et récuse le paternalisme qui vise à imposer aux citoyens une certaine éthique de vie. Tout en étant neutre à l’égard des conceptions individualiste et communautarienne de la personne, il cherche à équilibrer les droits collectifs des peuples avec les droits individuels des personnes.C’est donc une conception strictement institutionnelle de la laïcité que présentent les auteurs, qui redéfinissent au passage l’interculturalisme, la liberté rationnelle et le consentement, ainsi que l’expérience religieuse, qui devient hybride, à la fois subjective et objective. En se servant de Rawls, ils expliquent clairement pourquoi l’expression de la religion fait partie de la liberté religieuse, mais aussi pourquoi il faut faire la distinction entre les objets qui relèvent des libertés fondamentales et ceux qui sont sujets à des accommodements. Ils tracent ainsi une authentique troisième voie, qui pourrait bien faire sortir de l’impasse le débat québécois sur la laïcité.